La palette politique belge

 

Dans beaucoup de pays, notamment européens, on attribue volontiers une couleur particulière à chacun des partis politiques. Cet usage, copieusement entretenu par les médias, permet sans doute à l'électeur d'y voir plus clair lors des campagnes électorales, chaque parti utilisant des affiches et autres tracts correspondant à sa couleur.

En Belgique, la barrière linguistique complexifie la répartition des couleurs. Classiquement, le rouge est réservé aux socialistes, le rouge foncé à l'extrême gauche (PTB-PVDA), le bleu aux libéraux, le vert aux écologistes et l'orange aux chrétiens démocrates, devenus humanistes. A cela s'ajoute le jaune pour les nationalistes et séparatistes flamands (NVA), le brun (ou noir) pour l'extrême droite flamande (Vlaams Belang) et l'amarante pour les fédéralistes francophones (Défi).

 

 

Le système électoral étant basé sur la proportionnelle, à l'instar des IIIe et IVe Républiques en France, aucun parti n'obtient une majorité suffisante pour gouverner seul. Des alliances sont donc indispensables … et âprement négociées ! Ce qui a été le cas après les élections de mai 2019, jusqu'à la formation d'un nouveau gouvernement le 1er octobre 2020 !

Le gouvernement sortant (la Suédoise), amputée des Nationalistes Flamands (NVA – Jaune) démissionnaires, a assumé durant 21 mois les "affaires courantes", dont la crise sanitaire.

En se basant sur ce "code de couleurs", les nombreuses possibilités de coalitions se sont vues attribuer des noms imagés faisant référence soit à des drapeaux, soit au résultat du mélange de couleurs.

Pendant longtemps, les coalitions au niveau national ont été bicommunautaires, c’est-à-dire qu'elles regroupaient d'office des "partis frères" francophones et néerlandophones.

La tripartite traditionnelle associant libéraux, socialistes et chrétiens démocrates, très souvent utilisée dans le passé, ne s'est pas vue attribuer de surnom. Depuis quelques années, la multiplicité des combinaisons possibles aux différents échelons de pouvoir a rendu nécessaire de leur attribuer des noms particulièrement imaginatifs.

La "Rouge romaine", regroupe socialistes et chrétiens démocrates. La "Violette", associe socialistes et libéraux. La "Turquoise" rassemble libéraux et écologistes. "L'Orange bleue" regroupe libéraux et chrétiens. "L'Olivier", tripartite entre socialistes, écologistes et chrétiens. "L'Arc-en-ciel" associe libéraux, socialistes et écolos. La "Jamaïcaine" rassemble libéraux, chrétiens et écolos. La "Rouge sanguine" regroupe libéraux (N et F), chrétiens flamands et socialistes francophones. La "Lilas", libéraux et chrétiens (N et F) avec socialistes francophones.

La "Suédoise" (Gouvernement démissionnaire depuis le 21 décembre 2018 !), réunissait les nationalistes flamands (NVA), les chrétiens flamands et les libéraux francophones et néerlandophones. La "Pastèque", coalition écolos et socialistes (vert à l'extérieur, rouge à l'intérieur). La "Portugaise" côté francophone avec écolos, socialistes et communistes. La "Bourguignone" côté flamand, avec nationalistes, libéraux et socialistes. 

La plupart de ces coalitions ont été essayées, avec plus ou moins de bonheur, d'autres restent encore hypothétiques. Certaines ne sont possibles qu'au sein de l'une des deux communautés linguistiques.

La dernière a avoir été envisagée s'appellait "Arizona", en référence au drapeau de cet Etat. Les rayons rouges pour les socialistes (Nord et Sud), la bande bleue pour les libéraux (N et S), l'étoile orange pour les socio-chrétiens (N et S) et les rayons jaunes pour les nationalistes flamands.

Finalement, c'est la "Vivaldi" qui l'a emporté au début de l'automne 2020, avec sept Vice-Premier ministres, dont la première "Vice-Première" transgenre du monde !                                                   

"Vivaldi", en référence aux quatre saisons : verts (printemps), rouges (été),orange (automne) et bleus (hiver). Le "concerto pour deux mandolines", NVA (nationalstes flamands) parti majoritaire au nord et Socialistes, majoritaires au sud, est difficilement envisageable, tant leurs programmes sont divergents.

Manifestement, les journalistes et les politologues belges font preuve d'une imagination particulièrement "colorée".

En "Macronie", la nécessité de coalition ne s'est pas posée à l'échelon national durant le premier quinquénat. Depuis le second, le Président n'ayant pas la majorité absolue au Parlement, tergiverse entre associations ponctuelles et 49.3 !

Par contre, au sein des nouvelles régions, des départements et des communes, des alliances, quelques fois "contre nature", peuvent s'avérer indispensables. Malheureusement, jusqu'à présent, l'imagination débordante des Belges n'a pas transsudé outre-Quiévrain pour les baptiser de ces noms quelque peu surréalistes.

Par Philippe Rateau 

Éxilé au-delà des Hauts de France

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